La Direction d’AXA IM a tout compris : quelque soit le contenu des accords salariaux, elle aura toujours un ou deux syndicats pour le signer. Les augmentations générales et individuelles stagnent ou baissent chaque fois qu’il y a une négociation. Si la Direction a toujours poussé à l’individualisation de la rémunération chez AXA IM, la négociation collective a néanmoins réussi à instaurer quelques garanties collectives. En décembre dernier, au titre de la Négociation Annuelle Obligatoire (NAO) sur les salaires AXA IM de mars 2018, les syndicats signataires ont lâché toute garantie obtenue difficilement depuis 2011, et ont même donné à la Direction encore plus de flexibilité pour octroyer les augmentations, primes et bonus à la « tête du client ». Pourquoi l’UGICT-CGT n’a pas signé l’accord NAO 2017 AXA IM pour 2018, et comment cet accord se compare-t-il aux accords « triennaux » des années passés ?

POINTS CLES DES ACCORDS SALARIAUX CHEZ AXA IM DEPUIS 2005

La CGT a participé à toutes les négociations salariales chez AXA IM depuis 2005. Nous avons pu par conséquent voir en profondeur les différents sujets évoqués et constater des tendances sur la durée.

Les augmentations salariales chez AXA IM baissent chaque fois que les syndicats négocient avec la Direction. Pourquoi la Direction donnerait plus quand les syndicats formant une majorité électorale sont d’accord avec n’importe quelle proposition ?

  • Tout d’abord, les non cadres : Leurs augmentations baissent à chaque négociation ;
  • Concernant les « budgets » d’augmentations salariales négociés par les syndicats signataires pour les Cadres, ils sont très en-dessous de ce qui est réellement attribué aux salariés « à la tête du client » ;
  • A part le taux d’augmentation général des non-cadres (1,2%), l’accord NAO 2017 ne contient aucune obligation pour la Direction.

LES GARANTIES  DES ACCORDS PRÉCÉDENTS SONT SUPPRIMÉES

Les salariés savent que la signature de l’UGICT- CGT n’est pas donnée légèrement, contrairement aux syndicats qui signent tout. Pour que l’UGICT- CGT signe, il faut que l’accord apporte un réel atout pour les salariés. Pourquoi l’UGICT- CGT a signé l’accord salarial AXA IM en 2011 ? Pourquoi  n’a t-elle pas signé les accords salariaux avant ou après l’accord historique de 2011-2013 ?

Pas de clause concernant les collaborateurs ne s’étant pas vu attribuer d’augmentation individuelle ou de prime (clause de rencontre) :

Avant l’accord de 2017, les Non-Cadres n’ayant pas reçu d’augmentation ou de prime ont toujours bénéficié d’un droit à rencontrer leur manager avec un représentant de la DRH pour faire un point sur la situation et avoir une réponse écrite et circonstanciée.

A partir de l’accord de 2011, grâce à la pression de la CGT qui a signé l’accord, les Cadres n’ayant pas reçu d’augmentation ou de bonus ont pu bénéficier pour la première fois de ce droit de « rencontre ».

Mais les syndicats signataires ont estimé que ce droit n’était plus important, et le nouvel accord applicable en 2018 ne prévoit rien pour ceux qui ne reçoivent rien.

« Il ne vous reste plus que vos yeux pour pleurer !»

Pas de clause garantissant une augmentation minimum des cadres au cas ou aucune augmentation ou bonus individuel (clause de rattrapage ou « clause balai ») :

Avant l’accord de 2017 applicable en 2018, les Cadres des classes 5 et 6 ont pu bénéficier d’une garantie d’augmentation salariale au moins égale à l’augmentation générale des Non-Cadres (clause de rattrapage ou “clause balai”). Sous l’accord de 2007, tous les Cadres classes 5 et 6 étaient concernés, quelque soit leur métier d’origine. Sous l’accord de 2008, les signataires ont décidé de restreindre ce droit à rattrapage aux Cadres Classes 5 et 6 des fonctions support, à l’exclusion des cadres des métiers d’investissement et commerciaux. La CGT n’a signé ni l’un, ni l’autre, estimant qu’il n’y avait pas lieu d’exclure les Cadres de la Classe 7.

En 2011, par contre, la CGT a signé l’accord salarial parce que la clause balai a visé tous les cadres. Mais au terme de l’accord, la Direction a refusé d’inclure les classes 6 et 7 dans le rattrapage, estimant, selon sa lecture, que la clause balai ne visait que les Cadres de la Classe 5. Certains syndicats ont saisi le Tribunal de Grand Instance de Nanterre. C’est là où certains syndicats ont compris que la Direction n’applique pas de bonne foi des accords salariaux signés. Deux syndicats, dont l’UGICT-CGT, n’ont pas signé l’accord de 2014.

La polémique est totalement contournée dans le nouvel accord de 2017 pour la revue salariale de mars 2018 : Les signataires ont décidé de mettre en place un langage encore plus vague et de donner entière confiance à la » bienveillance » de la DRH :

« Sur la base de ces éléments, la Direction s’engage lors de la revue annuelle des rémunérations de mars 2018, à porter une attention particulière et ciblée sur la situation des femmes au sein de ces populations et, le cas échéant, en cas d’écart non justifié par des raisons objectives, à prendre les mesures salariales nécessaires afin de les supprimer. »

Une attention particulière” et un “suivi” trois ans dans le futur (3 ans après l’expiration de l’accord) prend la place de la phrase « se verra appliquer un rattrapage… »

Si l’un des syndicats signataires est constant dans sa politique de “toujours signer quelque soit le contenu”, l’autre est une curiosité: il n’avait pas signé l’accord de 2014 parce que le Cadres de la Classe 7 était exclus, mais il a signé l’accord de 2017 avec encore moins de garanties pour tous les Cadres…

“SI LE BONUS POOL LE PERMET” : LES PRIMES ET BONUS INDICATIFS DEVIENNENT ENCORE PLUS DISCRÉTIONNAIRES

Certains syndicats signataires du nouvel accord 2017 sur la revue salariale 2018 étaient fières d’annoncer qu’ils ont “obtenu” une augmentation des primes et bonus indicatifs, qui sont restés inchangés depuis au moins 2008 et qui étaient très inférieurs des moyennes réellement attribuées aux salariés Cadres et Non-Cadres.

La rémunération variable chez AXA IM a toujours été purement discrétionnaire, quelques soit les primes et bonus “indicatifs” : La Direction n’a jamais été obligée de donner à qui que soit le montant indicatif, et en pratique plusieurs salariés recevaient moins que les montants indicatifs, alors que d’autres recevaient plus.

Les signataires de l’accord de 2017 ont donné une flexibilité supplémentaire à la Direction: les primes et bonus sont indicatifs “si le bonus pool le permet”. Cette phrase ne figure nullement dans les accords salariaux précédents, et montre à quel point les syndicats signataires ont capitulé face à la Direction qui veut réduire les coûts par tout moyen : Même si la performance individuelle du salarié est bonne, la Direction peut toujours ne lui  octroyer rien au seul motif que “le bonus pool ne le permet pas”. Comment contrôler cette exception ?

C’est l’abandon total du rôle de négociateur des salaires effectifs au sein de l’UES AXA IM : Justement. Les syndicats représentatifs sont là pour négocier, entre autres, le bonus pool !

La Négociation Annuelle Obligatoire 2017 — la première de l’histoire d’AXA IM — a « reporté » 4/5e des sujets à un autre moment. Il n’y aura plus aucune NAO à la suite des ordonnances « Macron »
La Direction d’AXA IM n’a jamais respecté l’obligation de négocier « annuellement » les salaires. Elle a toujours mené des négociations « triennales » (tous les trois ans) avec l’accord des syndicats réformistes. Mais la loi du 8 août 2016 (« Loi El Khomri ») a modifié l’article L2242-1 du Code du travail, prévoyant notamment que l’employeur engage « chaque année » une négociation sur (1) la rémunération, (2) le temps de travail, (3) le partage de la valeur ajoutée, (4) l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et (5) la qualité de vie au travail.
C’est la version de l’article L.2242-1 du Code du travail qui s’appliquait à l’ouverture de la NAO 2017 AXA IM. La Direction a été alors obligée d’en parler. Mais sans aucune pression des syndicats « réformistes » majoritaires, elle a renvoyé tout sujet aux calendes grecques :

  • L’UGICT-GCT avait demandé la revalorisation de la subvention cantine d’1€, étant donné que cette subvention n’a jamais été revalorisée depuis au moins 15 ans. Si, par coïncidence, la Direction a récemment aligné la subvention cantine des salariés d’AXA IM sur la subvention de real Asset(+16 centimes), l’accord NAO n’en fait aucune mention parce qu’il s’agissait d’une décision unilatérale de l’employeur. Aucune “négociation” sur la subvention cantine n’a eu lieu.
  • L’UGICT-CGT avait demandé une revalorisation des primes pour travail le soir et le week-end (astreintes), étant donné que cela fait 8 ans depuis la dernière revalorisation en 2010, soit 3 ans de plus entre la revalorisation de 2010 et la mise en place des primes en 2005. Sur ce point, les signataires se sont contentés d’écrire : “le travail exceptionnel les jours fériés, les week-ends et le soir faisant l’objet d’un accord collectif spécifique, les discussions relatives à ce dernier feront l’objet d’échanges lors de séances de négociations dédiées.” Là encore, les syndicats signataires ont tout simplement capitulé: La NAO était l’occasion de négocier, et de contraindre la Direction à répondre de manière motivée aux revendications des organisations syndicales. Non seulement les signataires n’avaient pas leur propres revendications, mais ils ont laissé la Direction ignorer les revendications réelles et motivées des salariés exprimées par le Syndicat UGICT-CGT.
  • Idem sur les conditions de travail des télétravailleurs : L’UGICT-CGT avait demander la prise en charge d’une partie des frais de connexion internet des salariés executant du travail depuis leur domicile (à l’instar de ce qui se fait chez AXA France depuis des années), ainsi que la prise en charge du repas lors des jours télétravaillés (dans la limite de la subvention cantine, qui est perdue quand le salarié n’est pas dans les locaux de la Tour Majunga). Les syndicats majoritaires signataires n’avaient aucune revendication en la matière, et l’accord NAO n’en fait aucune mention.
  • L’UGICT-CGT était le seul syndicat qui a demandé un budget spécial pour rattrapage des salaires des femmes par rapport aux hommes qui font le même travail. Aucun budget pour réduire des écarts des rémunérations des hommes et des femmes n’a été attribuée au titre de la NAO2017 AXA IM pour 2018 !
  • L’UGICT-CGT était le seul syndicat qui a demandé un budget et des engagements concrets pour ramener les travailleurs handicapés au sein de l’UES au minimum légale de 6% des effectifs. Après une déclaration des bonnes intentions, sans aucun engagement concret de la Direction ni de budget, les signataires se sont contentés de la phrase suivante : “Les parties tiennent à souligner que l’implication et l’engagement de tous sont des facteurs déterminant qui permettront une réelle progression de la prise en compte de ce sujet au sein de l’UES AXA IM.” C’est ça la négociation entre la Direction et les syndicats signataires AXA IM ?

Et après tout celà, la direction vous envoie des communications sur la journée de la femme, en se gargarisant de mots sur la promotion des femmes au sein de l’entreprise et se garde bien de parler d’égalité salariale……des paroles….des paroles….

LA NAO AXA IM 2017 : UNE OCCASION RÂTÉE QUI NE SE RÉPÈTERA PAS APRES LA RENTRÉE EN VIGUEUR DES ORDONNANCES MACRON

Tout cela est maintenant théorique. 2017 était la première et dernière vraie Négociation Annuelle Obligatoire par laquelle les syndicats auraient pu mettre la Direction face à sa responsabilité de négocier loyalement les salaires effectifs, le temps et les conditions de travail des salariés.

Depuis l’entrée en vigueur de l’Ordonnance du 22 septembre 2017, l’une des « Ordonnances Macron », l’employeur n’est tenu d’engager des négociations obligatoires à ces sujets qu' »au moins tous les quatre ans ».

L’individualisation extrême des salaires pousse à la concurrence féroce entre collègues, à la frustration des salariés et des managers et à la dégradation des conditions de travail.

L’UGICT-CGT est le seul syndicat chez AXA IM qui exige une vraie négociation des salaires effectifs. Elle devrait concerner l’ensemble des salariés, sans exclusion d’une quelconque catégorie (et notamment les cadres dirigeants). Elle devrait contenir un minimum de revalorisation des salaires de tous les salariés pour tenir compte de l’augmentation du coût de la vie. Et elle doit concerner les règles pour calculer et distribuer le bonus pool pour compenser les salariés qui dont supporter une surcharge de travail importante avec les départs « rocks » non remplacés et une transformation constante de l’outil de travail alors que la direction annonce  les bons résultats de l’entreprise.

Les syndicats signataires majoritaires ont abandonné ces principes. Mais l’UGICT-CGT est toujours là pour rappeler l’alternative.

L’UGICT-CGT A NÉANMOINS ADHÉRÉ AU DISPOSITIF POST-SIGNATURE POUR PARTICIPER AU CONTRÔLE DE L’APPLICATION EFFECTIVE DE L’ACCORD

Si l’UGICT-CGT a décidé de ne pas valider le pire accord salarial de l’histoire de l’UES AXA IM, et si nous regrettons profondément la désolidarisation des autres syndicats, elle ne sera pas pour autant absente de la commission de suivie qui sera chargée de contrôler l’application effective de l’accord. En effet, l’UGICT-CGT vient d’accomplir les formalités pour adhérer post-signature à l’accord sur la NAO AXA IM 2017, conformément à l’article L.2261-3 du Code du travail. Nous ne laissons pas tomber les salariés !

PARMI LES SYNDICATS, FAITES LA DIFFÉRENCE !

 

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