On aurait tout vu : Au CE du 21 juin 2018 dernier — à l’occasion du recueil de l’avis du Comité d’Entreprise sur la situation économique et financière de l’entreprise mise en avant par la Direction pour justifier son « PSE volontaire » –, la Direction d’Axa IM a procédé au recueil des « déclarations indépendantes » des organisations syndicales, en parfaite méconnaissance des dispositions légales d’ordre public et même de la jurisprudence datant de 2006 visant la pratique illégale d’AXA de remplacer l’avis motivé du CE par l’avis des organisations syndicales auxquelles leurs membres sont susceptibles d’appartenir. La Direction s’est abstenue fautivement de rappeler à l’ordre plusieurs mélanges de genres entachant la régularité même du recueil d’avis : Le Président de la « Commission Economique » du CE — chargée d’étudier les documents économiques et financiers recueillis par le Comité d’Entreprise –, a complètement abandonné son obligation de neutralité vis-à-vis des organisations syndicales et a donné « lecture de l’avis de la CFDT », qui n’était rien d’autre que l’avis rédigé par le cabinet SYNDEX, mandaté par le CE et rémunéré par l’employeur au titre de l’articles L. 2325-35 et L. 2323-12 du Code du Travail ; le Représentant Syndical CFDT, présent à la réunion, ne s’est pas exprimé. Ensuite, un élu membre du CE a donné « lecture de la déclaration « , au nom du syndicat CFE-CGC alors que le mandat de Représentant Syndical CFE-CGC est vacant. Si le Représentant Syndical Ugict-CGT a donné lecture de l’avis de notre Syndicat, c’est tout à fait normal étant donné que notre Syndicat ne dispose pas d’élu titulaire au comité et que notre seule voix consiste à l’avis donné par le RS. A la suite de ces déclarations syndicales, dont une seule lue régulièrement par le RS Ugict-CGT, la Direction a procédé à un vote en concluant que la situation économique et financière d’Axa IM au titre de l’année 2017 était approuvée à la majorité des voix, 4 avis défavorables (dont 2 l’UGICT-CGT ) et 7 avis favorables (pour le syndicat majoritaire), et zéro abstentions, ALORS QUE LE CE AXA IM N’EST COMPOSÉ DE 8 ÉLUS TITULAIRES ! L’Ugict-AIM dénonce cette mascarade et cette complicité pour donner une « belle image » FAVORABLE au motifs économiques et financiers pour la suppression des emplois.
PAR DÉCISION DU 5 OCTOBRE 2005, LA COUR D’APPEL DE PARIS A DONNÉ TORT À AXA EN STATUANT QUE L’AVIS DU COMITÉ D’ENTREPRISE NE PEUT ÊTRE EXPRIMÉ QUE PAR LES MEMBRES DU CE ET NON PAR LES ORGANISATIONS SYNDICALES AUXQUELLES ILS APPARTIENNENT
Cela fait depuis près de 20 ans qu’Axa a eu à plusieurs reprises des problèmes à consulter ses instances sociales. Le 28 novembre 2000, la Cour de cassation a décidé que les sociétés UAP et AXA ne pouvaient pas mettre en place le contrat collectif d’assurance « Réponse Santé », faute d’avoir consulté le comité d’entreprise, et devaient en reporter le lancement jusqu’à ce que le CE ait donné son avis sur le nouveau mode de rémunération variable qui en résultait pour les commerciaux.
Puis en octobre 2004, Axa a fait part au Comité Central d’Entreprise (CCE) de son projet de transférer le personnel installé rue de Vienne à la Défense. La consultation a eu lieu avec le président du CCE demandant à chaque organisation syndicale représentée d’exprimer son avis. Le procès-verbal est établi en reprenant, syndicat par syndicat, l’opinion de chacun.
Alors qu’Axa croyait s’être acquitée de ses obligations auprès du CE, elle a reçu par la suite une assignation devant le juge des référés pour faire interdiction, sous astreinte, à la société de procéder au déménagement tant que l’avis du comité n’aura pas été convenablement recueilli : En effet, le procès-verbal ne faisait pas état de l’avis du comité, mais d’une série d’avis des organisations syndicales.
Axa s’est défendue en faisant remarquer que le législateur n’a prévu aucun formalisme particulier pour la formulation de l’avis du CE.
Lire l’article des Echos de l’époque : « Les pièges de la consultation du CE »
Par décision du 5 octobre 2005, la Cour d’appel de Paris a décidé, en effet, que la Direction d’Axa aurait dû consulter les élus du CE, et ne pouvait pas se contenter de consulter les organisations syndicales de ceux-ci :
« En vertu de l’article L. 431-4 du code du travail, le comité d’entreprise assure l’expression collective des salariés lorsqu’il est consulté sur la décision du chef d’entreprise qui doit recueillir l’avis dudit comité ; il en résulte que cet avis ne peut être exprimé que par les membres du comité d’entreprise et non par les organisations syndicales auxquelles ils appartiennent. La cour d’appel qui, statuant en référé, a constaté qu’il était d’usage au sein d’un comité central d’entreprise que l’avis du comité soit exprimé sous forme d’une prise de position de chaque organisation syndicale, a légalement justifié sa décision faisant interdiction à un employeur de mettre en oeuvre une mesure décidée par lui tant que l’avis du comité central d’entreprise n’aurait pas été régulièrement recueilli. »
Axa n’était toujours pas d’accord, et a fait appel à cette décision.
Par décision du 5 décembre 2006, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi d’Axa, confirmant la décision de la Cour d’appel :
« Mais attendu que ne constitue pas une contestation sérieuse celle qui consiste à soutenir que l’avis motivé d’un comité d’entreprise peut être remplacé par l’avis des organisations syndicales auxquelles ses membres sont susceptibles d’appartenir ; que le moyen n’est pas fondé »
Lire l’ « arrêt Axa » complet de la Cour de cassation
LORS DE LA SÉANCE DU CE AXA IM DU 21 JUIN 2018, LA DIRECTION A RECUEILLI LES AVIS DES ORGANISATIONS SYNDICALES, SUIVI D’UN VOTE DE TOUS LES REPRÉSENTANTS DU PERSONNEL CONFONDUS : TITULAIRES, SUPPLÉANTS, ET REPRÉSENTANTS SYNDICAUX
A la suite des « déclarations syndicales » sur la situation économique et financière d’Axa IM, dont la seule lue régulièrement par le RS Ugict-CGT, la Direction a procédé à un vote consigné dans les termes suivants : « Les élus rendent 2 avis défavorables (pour la CGT) et 7 avis favorables (pour les autres organisations syndicales). Aucune abstention n’est relevée. La situation économique et financière d’Axa IM au titre de l’année 2017 est approuvée à la majorité des voix. »
Il y a des erreurs monumentales dans ce comptage de voix : Le CE d’Axa IM est composé de seulement 8 titulaires avec droit de vote. Il est donc impossible d’avoir un vote de « 2 avis défavorables » et « 7 avis favorables ». En réalité, la Direction a fait voté les suppléants (qui ne votent qu’en remplaçant un titulaire), et a fait voté des RS (qui n’ont qu’une voix consultative au CE — ils ne votent pas).
Mais l’erreur la plus grave c’est l’appropriation des travaux de la Commission Economique et de l’Expert Comptable mandaté par le CE et rémunéré par l’employeur, par l’organisation syndicale CFDT. L’objet du CE, comme rappelé par la Cour d’appel de Paris et par la Cour de cassation il y a plus de 10 ans, l’employeur doit recueillir l’avis des ÉLUS du CE, et non de celui des ORGANISATIONS SYNDICALES auxquelles ces élus sont susceptibles d’appartenir.